Des études de biosurveillance ont montré l’exposition des femmes enceintes à des substances de synthèse. Parallèlement, plusieurs études épidémiologiques ont mis en évidence des associations entre des concentrations mesurées dans le sang des femmes enceintes ou dans le sang de cordon et des effets néfastes sur le nouveau-né comme sur sa santé plus tard dans la vie. Néanmoins, ce type de mesures n’offre pas la certitude d’être représentatif des expositions intra-utérines tout au long de la grossesse, et il n’est pas envisageable de mesurer longitudinalement les concentrations fœtales pour des raisons éthiques évidentes. Les modèles pharmacocinétiques basés sur la physiologie pour la femme enceinte et son fœtus (pPBPK) permettent de simuler les expositions internes d’un xénobiotique dan[...]
Des études de biosurveillance ont montré l’exposition des femmes enceintes à des substances de synthèse. Parallèlement, plusieurs études épidémiologiques ont mis en évidence des associations entre des concentrations mesurées dans le sang des femmes enceintes ou dans le sang de cordon et des effets néfastes sur le nouveau-né comme sur sa santé plus tard dans la vie. Néanmoins, ce type de mesures n’offre pas la certitude d’être représentatif des expositions intra-utérines tout au long de la grossesse, et il n’est pas envisageable de mesurer longitudinalement les concentrations fœtales pour des raisons éthiques évidentes. Les modèles pharmacocinétiques basés sur la physiologie pour la femme enceinte et son fœtus (pPBPK) permettent de simuler les expositions internes d’un xénobiotique dans différents organes au cours de la grossesse. Ils fournissent donc l’opportunité de parfaire les estimations de la relation entre dose et risque de survenue d’effets toxiques par une amélioration de la dosimétrie au niveau des tissus. Toutefois, même si les modèles pPBPK peuvent intégrer les changements physiologiques liés à la grossesse, la connaissance de certains processus reste parfois limitée. C’est notamment le cas du passage transplacentaire (PT). L’objectif de la thèse consiste à améliorer la prise en compte du PT dans la modélisation pPBPK en vue de prédire des expositions internes fœtales à partir de données de biosurveillance.
Une revue de la littérature sur la modélisation du PT dans les modèles pPBPK a été menée. Ce travail a permis d’identifier 12 structures parmi 50 modèles originaux qui correspondent à 4 types de profils cinétiques liés au nombre de constantes de passage. Les données animales représentaient leur principale source de paramétrisation, même si celles-ci ne sont pas directement extrapolables à l’homme et impliquent le sacrifice de nombreux animaux. A partir de notre revue, nous avons développé un modèle pPBPK intégrant quatre modèles de PT non basés sur des données animales afin d’évaluer leurs performances prédictives de la dosimétrie fœtale sur 10 composés. Nos résultats montrent que ces performances variaient suivant les modèles et les substances, empêchant d’identifier un modèle prédictif de référence. Des simulations Monte-Carlo ont permis de montrer qu’un des modèles différait des trois autres concernant les variations de profils d’exposition fœtale au cours des trimestres de grossesse. Enfin, une analyse de sensibilité globale a souligné l’influence majeure des constantes de passage et dans une moindre mesure de la clairance métabolique comme de la fraction libre sur l’exposition fœtale simulée. La dernière partie de la thèse a consisté à utiliser le modèle pPBPK développé pour estimer les concentrations internes fœtales des enfants de la cohorte française ELFE pour deux PCB et deux PBDE à partir de concentrations plasmatiques maternelles. Pour ce faire, nous avons sélectionné un modèle de PT spécifique à chaque composé sur la base de la qualité de prédiction de ratios de concentrations fœtale sur maternelle à terme. Le classement des substances basé sur des indicateurs d’exposition simulés s’est révélé être variable entre la mère et le fœtus à terme, comme entre le premier et les deux autres trimestres dans le plasma fœtal.
En conclusion, ce travail souligne le potentiel de la modélisation pPBPK pour l’évaluation des expositions prénatales. Il démontre la capacité d’un modèle à simuler des indicateurs d’exposition interne adéquats d’un point de vue mécanistique et temporel, notamment à partir de données de biosurveillance. Aussi, dans un contexte de fortes contraintes éthique et réglementaire, ce travail éclaire sur l’apport des méthodes alternatives dans la paramétrisation de processus clé de la dose interne fœtale tel que le passage transplacentaire. L’apport de cette thèse pourra être mis œuvre dans l’étude de l’exposome prénatal comme dans l’évaluation du risque de toxicité développementale d’une substance.
Numerous biomonitoring studies have shown the exposure of pregnant women to synthetic substances. In parallel, several epidemiological studies have highlighted associations between maternal blood concentrations measured during pregnancy or cord blood concentrations measured at birth and adverse effects in the offspring at birth or later in life. However, this type of measurements does not guarantee being representative of in utero exposures throughout pregnancy. Furthermore, it is not possible to measure longitudinally fetal concentrations due to obvious ethical reasons. Pregnancy physiologically-based pharmacokinetic (pPBPK) models allow the simulation of xenobiotic internal exposures in different maternal and fetal organs during gestation. Therefore, they offer an opportunity to better estimate the relationship between the dose and the risk of a toxic effect by considering tissue dosimetry. Although pPBPK models often incorporate physiological changes associated with pregnancy, some processes are still poorly known such as placental transfer (PT). The aim of the thesis is to improve the integration of PT in pPBPK modelling in order to predict fetal internal exposures from biomonitoring data.
First, a scientific literature review of the published pPBPK models was conducted with a focus on the various model structures used to describe PT. It allowed the identification of 12 structures among 50 original models which corresponded to 4 types of kinetic profiles according to the number of transfer constants. Animal in vivo data were identified as the main source to support their parameterization although they cannot be directly extrapolated to humans and imply the killing of numerous animals. From this basis, we developed a pPBPK model which integrated four transfer models calibrated using non-animal methods so as to assess their performance to predict the fetal dosimetry on a set of ten substances. Our results show that the performance varied among models and substances, preventing the identification of a reference predictive model. Monte-Carlo simulations showed that one of the transfer models differed from the others in terms of fetal exposure variation across trimesters. Finally, a global sensitivity analysis shed light on a great extent of influence of the transfer constants as well as the metabolic clearance and fraction unbound, to a lesser extent, on simulated fetal exposure. The last part of the thesis consisted in applying the developed pPBPK model to estimate the internal fetal concentrations of two PCB and two PBDE substances from observed maternal plasma concentrations taken from the French ELFE cohort. To that end, we selected a specific PT model for each compound based on the prediction of fetal to maternal concentrations ratio at term. The ranking of chemicals based on the simulated exposure indicators varied between mother and fetus at term, as between the first and the other two trimesters in fetal plasma.
In conclusion, this work highlights the potential of pPBPK modelling in the prenatal exposures assessment. It demonstrates the ability of a model to simulate adequate internal exposure indicators from a mechanistic and temporal points of view, notably from biomonitoring data. Furthermore, in light of strong ethical and regulatory constraints, this work indicates the role of alternative methods in the parameterization of key processes of the internal fetal dose such as the transplacental passage. This work could be used for the assessment of the prenatal exposome as well as in the developmental toxicity risk assessment of a substance.
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