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Le changement climatique est considéré comme un risque majeur pour la pérennité de la biodiversité : des taux élevés d’extinction d’espèces ont été prédits pour le siècle à venir. Le réchauffement climatique récent est déjà à l’origine de déplacements d’espèces, d’évolutions de la richesse spécifique et de remaniements des communautés. Ces changements résultent de phénomènes de colonisation et/ou d’extinction, pourtant ces derniers ainsi que leurs conséquences sur la viabilité à long terme des espèces n’ont jamais été étudiés de façon directe et conjointe.
Cette étude a été menée à l’aide de plus de 200 000 inventaires floristiques forestiers couvrant le territoire français de 1914 à 2014 et par l’utilisation d’une méthode d’appariement géographique et temporel des placettes non perm[...]

Le changement climatique est considéré comme un risque majeur pour la pérennité de la biodiversité : des taux élevés d’extinction d’espèces ont été prédits pour le siècle à venir. Le réchauffement climatique récent est déjà à l’origine de déplacements d’espèces, d’évolutions de la richesse spécifique et de remaniements des communautés. Ces changements résultent de phénomènes de colonisation et/ou d’extinction, pourtant ces derniers ainsi que leurs conséquences sur la viabilité à long terme des espèces n’ont jamais été étudiés de façon directe et conjointe.
Cette étude a été menée à l’aide de plus de 200 000 inventaires floristiques forestiers couvrant le territoire français de 1914 à 2014 et par l’utilisation d’une méthode d’appariement géographique et temporel des placettes non permanentes d’où proviennent les relevés. Nous avons tout d’abord montré que les déplacements des espèces végétales forestières en réponse au réchauffement climatique récent résultaient de modifications des deux processus de colonisation et d’extinction. Si, à l’échelle de l’espèce, les changements observés dans les processus d’extinction et de colonisation ne sont pas liés, ils sont d’une amplitude similaire pour l’ensemble des espèces étudiées. L’analyse des changements de composition des communautés montre cependant que ces changements ne sont pas uniformes sur l’ensemble du territoire français. En effet, nous avons observé une diminution du nombre d’espèces adaptées aux climats froids sur l’ensemble du territoire alors que le nombre d’espèces adaptées aux climats chauds n’a augmenté qu’en montagne. Cette différence est à l’origine d’une diminution de la richesse spécifique observée en plaine et d’une augmentation en montagne. Ceci se traduit par (i) une diminution de la fréquence des espèces montagnardes sur l’ensemble du territoire, (ii) une diminution en plaine et une stabilité en montagne de la fréquence des espèces sub-montagnardes et (iii) une augmentation en montagne ainsi qu’une stabilité en plaine de la fréquence des espèces de plaine. Finalement, nous avons montré que les évolutions récentes des aires de répartition des espèces sub-montagnardes étaient cohérentes avec les prédictions issues de modèles de distribution. A terme, ces changements pourraient entrainer une disjonction de leur distribution qui formerait alors un ensemble dans les massifs montagnards du sud de l’Europe et un autre en Europe du nord.
Ces travaux ont permis de confirmer les menaces qui pèsent sur la flore forestière : la perte de biodiversité en plaine et le risque d’extinction des espèces de climat froid. Ils ont également permis d’analyser plus finement les processus à l’origine du déplacement des espèces végétales forestières en réponse au réchauffement climatique récent et ouvrent ainsi la porte à une compréhension des mécanismes de réponse des espèces aux changements environnementaux.

Climate change is considered as a major threat for the sustainability of biodiversity: high species’ extinction rates have been predicted for the next century. Recent climate change has already driven shifts of species’ ranges, changes in species richness and reshuffling of communities’ composition. These changes result from patterns of colonisation and/or extinction. However, these patterns as well as their consequences for the future viability of species have never been studied as such before.
This study was based on more than 200,000 forest floristic inventories across the French territory conducted from 1914 to 2014. Carried out on non permanent plots, floristic inventories have been spatially and temporally paired up to analyse changes in plant species’ composition over time. We first showed that range shifts of forest plant species in response to recent climate warming have been induced by changes in both colonisation and extinction processes. At a species scale these changes in processes of extinction and colonisation were not related but on average for all the studied species the changes were of comparable magnitude. However, observed changes in communities’ composition have shown that these changes were not uniform across the French territory. Indeed, the number of cold-demanding species has decreased throughout the whole studied area whereas the number of warm-demanding species has increased only in mountainous areas. This difference has induced a decrease in species richness in lowlands and an increase in mountains. This phenomenon has resulted in (i) a decrease in the frequency of mountainous species throughout the whole studied area, (ii) a decrease of the frequency of mountainous species in lowlands and its stability in mountains and (iii) an increase of the frequency of lowland species in mountains and its stability in lowlands. Finally we showed that observed recent changes in the distribution of sub-mountainous plant species were concordant with the predictions of distribution models. In the future these changes could induce the disjunction of their ranges in two distinct populations on a European scale: one would be restricted to southern mountain ranges and the other would be localised in northern Europe.
This work confirms threats weighting on the forest flora: a loss of biodiversity in lowlands and a risk of extinction for cold-demanding species. Our results have given a more precise insight into processes inducing the shifts of forest plant species in response to recent climate change. They pave the way towards a mechanistic understanding of species’ response to environmental changes.