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"Dans la vallée d'Azzaden, située dans les montagnes du Haut-Atlas Marocain, la culture du mais, de l'orge, et des noyers, constituant la base de l'alimentation, n'est rendue possible que grâce à l'irrigation. Un réseau dense de canaux et de bassins permet l'alimentation en eau des terrasses, qui découpent les versants montagneux en autant d'escaliers géants. Ce paysage puissant témoigne du travail accompli par les hommes pour vivre dans un milieu particulièrement contraignant.
Si ce paysage figé semble inscrit dans l'espace de toute éternité, l'étude précise d'une partie du réseau d'irrigation du village de Tizi Zougaght nous révèle rapidement le caractère dynamique de cette agriculture. Issu de l'histoire sociale du village, le paysage irrigué a conservé les marques de c[...]

"Dans la vallée d'Azzaden, située dans les montagnes du Haut-Atlas Marocain, la culture du mais, de l'orge, et des noyers, constituant la base de l'alimentation, n'est rendue possible que grâce à l'irrigation. Un réseau dense de canaux et de bassins permet l'alimentation en eau des terrasses, qui découpent les versants montagneux en autant d'escaliers géants. Ce paysage puissant témoigne du travail accompli par les hommes pour vivre dans un milieu particulièrement contraignant.
Si ce paysage figé semble inscrit dans l'espace de toute éternité, l'étude précise d'une partie du réseau d'irrigation du village de Tizi Zougaght nous révèle rapidement le caractère dynamique de cette agriculture. Issu de l'histoire sociale du village, le paysage irrigué a conservé les marques de cette dynamique. L'étude de l'architecture du périmètre ainsi que des modalités de gestion et de répartition de la ressource en eau nous révèle qu'elles ont pu être les étapes de la construction du périmètre ainsi que les phénomènes physiques et humains qui en sont à l'origine. Elle nous éclaire également sur les répercussions qu'a pu avoir le choix de cette technique sur l'évolution de la structure sociale du village.
Les conditions d’accès à la ressource en eau apparaissent comme étroitement dépendantes de la triple appartenance de chaque individu au lignage, au village et à la tribu. Ainsi, à Tizi Zougaght, il semble qu'une hiérarchisation sociale, autrefois basée sur le prestige généalogique, ait entrainé une certaine inégalité entre les lignages dans l’accès à la ressource en eau; il apparaît que cette inégalité basée sur la naissance semble maintenant remplacée par des critères de classification prenant davantage en compte la richesse des lignages. Par ailleurs, la saturation foncière défavorise tout accès des lignages étrangers à la terre irriguée. Au sein du lignage, des stratégies patrimoniales visant à conserver la part d'eau au sein de la famille conduisent à favoriser l'accès à l'eau des aînés mâles au détriment des femmes et des cadets. Enfin, l'intégration du réseau d'irrigation de Tizi Zougaght à celui de la vallée toute entière crée une dépendance du village à la tribu, et il apparait que des antagonismes politiques ou religieux anciens expliquent l'existence de conflits ou de règles de partage de l'eau actuels.
Ainsi l'étude de ce réseau de Tizi Zougaght nous apparaît comme une voie d'entrée privilégiée à la compréhension de l'organisation de la tribu Azzaden, concernant aussi bien son histoire passée, que son organisation et sa dynamique actuelle."