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Depuis presque un siècle, en biologie comme dans le domaine de la sociologie, la pensée occidentale a été largement dominée par le modèle darwinien de la sélection naturelle. La synthèse des travaux de Darwin et des lois de la génétique mendélienne ont donné lieu à un consensus à peu près général. Et pourtant, il y a là, écrit Jacques Ruffié dans la préface de cet ouvrage, "une vision quelque peu simpliste du processus évolutif'. Or depuis vingt-cinq ans, dans le silence de son laboratoire blotti au pied du mont Fuji, Motoo Kimura a élaboré une théorie - la théorie neutraliste de l'évolution moléculaire qui renverse bien des tabous, brise d'anciens concepts traditionnels tenus pour immuables, et ouvre de nouvelles perspectives jusque là insoupçonnées. Le grand mérite de Kimura est d'i[...]

Depuis presque un siècle, en biologie comme dans le domaine de la sociologie, la pensée occidentale a été largement dominée par le modèle darwinien de la sélection naturelle. La synthèse des travaux de Darwin et des lois de la génétique mendélienne ont donné lieu à un consensus à peu près général. Et pourtant, il y a là, écrit Jacques Ruffié dans la préface de cet ouvrage, "une vision quelque peu simpliste du processus évolutif'. Or depuis vingt-cinq ans, dans le silence de son laboratoire blotti au pied du mont Fuji, Motoo Kimura a élaboré une théorie - la théorie neutraliste de l'évolution moléculaire qui renverse bien des tabous, brise d'anciens concepts traditionnels tenus pour immuables, et ouvre de nouvelles perspectives jusque là insoupçonnées. Le grand mérite de Kimura est d'intégrer les derniers acquis de la biologie moléculaire au schéma évolutif et de "remettre celui-ci à sa juste place - bien plus modeste". Kimura montre, de manière extrêmement argumentée, que la plupart des mutations sont sélectivement neutres et qu'elles ne suivent, dans leur devenir, que les lois du hasard. Ainsi s'explique le polymorphisme génétique propre à tous les êtres vivants. Ainsi s'explique que des espèces "fossiles", inchangées depuis des millions d'années, présentent une variation génétique souvent plus importante que les espèces ayant évolué rapidement. Inversement, une infime quantité de restructurations de l'ADN différencient l'homme du chimpanzé, et pourtant l'hominisation est un phénomène d'une immense ampleur.